Lundi 26 novembre 2018 avait lieu la journée de conférences Tendances communication, 14ème édition intitulée "Enjeux et perspectives pour le secteur de la communication à l'horizon 2019". Intervenants experts, acteurs majeurs de la communication, agences et annonceurs, organisation par Comundi - Stratégies Formations, pour qui j'interviens régulièrement sur mes sujets de prédilection, tout était réuni pour titiller mon intérêt. La journée fut copieuse, émaillée de bonnes nouvelles et pistes à suivre. Sélection de tendances inspirantes.
La culture et les valeurs avant le R.O.I.
Après une période très "ROIste", où l'on a pensé que le digital allait encourager la course aux clics publicitaires, le "targeting" ou ciblage de l'internaute, le tracking qui permet de suivre à la trace des profils selon leurs requêtes, jusqu'à les pousser vers un tunnel d'achat... il faut bien se rendre à l'évidence : le consommateur renâcle devant ces pratiques, s'en méfie et les fuit. Conclusion, ce n'est pas dans les fonctionnalités techniques à rentabilité immédiate que le digital sera le mieux exploité.
Une vision à plus long terme émerge comme gage de meilleurs résultats, avec pour objectif d'installer la culture des marques, séduire sur des valeurs. Ainsi AXA construit sa marque sur la thématique de la protection, faisant coïncider la noblesse des valeurs avec son offre d'assureur, sous un angle qui crée une relation de confiance avec le public.
Un rapport avec une marque se construit dans le temps : vive la slow communication !
L'importance de l'expérience utilisateur
Offrir à l'utilisateur une expérience de la marque satisfaisante, en parfaite adéquation avec ce qu'il recherche, voilà la clé. Ce qui séduit chez Amazon, c'est la rapidité de réaction, le choix, l'efficacité du service. Nul besoin de proposer pour cela un site d'une esthétique ravageuse et à la pointe des tendances graphiques. Lorsqu'il vient, le client veut trouver un produit, effectuer un achat, être livré rapidement, à tout moment. Facilité d'usage, qualité de choix et service sont le gage de son expérience réussie de la marque. Ce qui le fait revenir. Même si le site internet n'est pas franchement beau.
Mass, social et digital media, même combat
L'opposition entre mass media (TV, radio, journaux...), social media (réseaux sociaux) et publicité en ligne n'a plus lieu d'être. Alors qu'un premier mythe a consisté à laisser entrevoir le surpassement des medias "historiques" par les petits nouveaux numériques, affolant les annonceurs au cri de "tous sur les réseaux sociaux" et autres "point de salut sans une omniprésence de bannières publicitaires sur tous les canaux digitaux", on revient à une vision plus équilibrée de la stratégie globale de communication. A preuve de cette nécessaire rationalisation, une étude Kantar Millward Brown révèle qu'après 6 mois d'arrêt d'une publicité à la télévision, la plupart des indicateurs de santé des marques se trouvent dégradés. Ne rien laisser tomber, trouver l'harmonie et coordonner, et surtout retrouver le chemin de contenus à forte valeur ajoutée, la recherche de (bon) sens reprend le pas sur l'occupation du terrain et les pop-up à tous crins.
Communication et gouvernance, en rythme !
Digital, marketing, community management, production de contenus, relation clients, commercial... parce que toutes les énergies doivent converger dans un but commun, la satisfaction de l'utilisateur, et que le message envoyé par la marque doit porter une culture incarnée par toutes les parties prenantes, la communication est un acteur à part entière de la stratégie d'entreprise.
Dans son action, la DirCom devient un véritable chef d'orchestre, rapprochant les équipes, coordonnant les métiers. Cadencer les actions, envisager la présence de la marque dans un écosystème devenu vaste et en perpétuelle évolution, progresser dans la compréhension de la cible et se déplacer à son rythme, sur ses terrains favoris et avec ses codes, le rôle nécessite un regard global et la coordination de ressources aux compétences fines, multiples.
Tout consommateur est un influenceur potentiel... c'est aussi le cas des collaborateurs.
Créer du contenu qui se partage
Nous sommes entrés dans une ère de consommation de partage et d'influence. En conséquence, il importe de créer du contenu partageable, qui plaise aux influenceurs et leur donne envie de relayer à leur tour les messages.
Le secret de Nicolas Bordas / TBWA Worldwide pour y parvenir, c'est d'appliquer les "3 E" :
- Ego, en valorisant l'estime de soi des cibles visées. On partage ce qui nous valorise en le faisant. Exemple : Allways et sa campagne #CommeUneFille
- Expérience, la proposition de vivre un moment unique. On partage ce qui nous a procuré des émotions nouvelles, un décalage par rapport au quotidien.
- Exclusivité, ce levier qui donne le sentiment d'accéder à un cercle privilégié. On partage ce qui fait de nous un vip, nous donne de la valeur. Exemple la personnalisation chez Evian ou Nikeid .
Se connaître soi-même et connaître ses publics
C'est une bonne nouvelle, à de nombreuses reprises au cours de la journée a été formulé que la démarche principale est de comprendre les publics. (Vive la démarche UX... et l'UX Writing !)
Les publics sont zappeurs, ils s'organisent en tribus, lesquelles sont mouvantes et ne se fient plus aux codes publicitaires. Les enjeux de communication sont de plus en plus forts hors des media dont l'émetteur est l'annonceur, sur le terrain de l'influence et du partage d'expérience, entre pairs.
On va vers une marque de plus en plus pour ses valeurs, on y reste pour la qualité de son service, de ses produits. Plus une marque se connaît, présente une identité forte et sincère, plus ses valeurs sont incarnés, démontrées, convaincantes.
"Les nano influenceurs, c'est vous, c'est moi, c'est nous !" Guillaume Mikowski.
Nano influenceurs versus stars
Pour Guillaume Mikowski / Brainsonic, les gens sont en train de se transformer en media. Nous entrons dans l'ère de la social communication.
La nano influence s'affirme, qui favorise le pouvoir d'influence, via les réseaux sociaux, d'individus à moindre nombre de followers ou abonnés que les grosses stars du sport ou du spectacle, mais très ciblés, qualifiés. Leur recommandation est d'un impact puissant.
Le phénomène est à rapprocher de celui des collaborateurs ambassadeurs, relayant les messages de la marque via leurs profils de réseaux sociaux et répercutant la communication au-delà des frontières de l'entreprise : l'employee advocacy fait partie intégrante de la stratégie de communication.
La dimension symbolique des marques
Après une démonstration sur la perte des repères (familiaux, religieux) expliquant l'actuelle recherche de sens, Stéphane Hugon / Eranos explique combien les marques s'emparent aujourd'hui de la dimension symbolique. Selon lui, elles ont une responsabilité éthique, sont dépositaires d'une promesse relationnelle (créer le rassemblement autour de valeurs communes).
En conséquence la première chose à faire en communication est de plonger dans l'introspection : savoir qui l'on est, les valeurs que l'on défend.
Les pouvoirs de la data sémantique
Comment les clients / prospects décrivent-ils votre produit ? Quels mots utilisent-ils ? Sur quel ton en parlent-ils ?
Analyser les conversations sur les réseaux sociaux, les commentaires suite à la diffusion d'un article ou d'une vidéo, les requêtes Google ou les logs sur votre site internet, recueillir les verbatim, ces pratiques sont précieuses. Le langage employé, le réseau sémantique _ choix et association de mots, synonymes, marqueurs du niveau de langage, etc._ sont révélateurs de l'imaginaire des consommateurs. Or accéder à l'imaginaire, c'est connaître les désirs, envies, besoins, rêves des publics. Ils sont dans leur expression, dans leurs mots.
Les outils d'analyse sémantique traqueurs de #beautifuldata deviennent les alliés des communicants, capables de décrypter l'empreinte digitale des internautes.
"Le sang dans l'entreprise, c'est le langage."Jeanne Bordeau.
Raconte-moi une histoire !
Bonne nouvelle avec ce constat que je partage au moment de l'intervention de Jeanne Bordeau / Institut de la qualité de l'expression : le digital a réinventé le langage. Les marques capables d'utiliser les potentialités créatives des contenus multiformats parviennent à réconcilier la raison et l'émotion, en se racontant sous forme d'histoires. Or raconter une histoire est source de séduction. Netflix en est le symbole, qui révolutionne les usages du visionnage de fiction et plus largement tout l'écosystème audiovisuel, en alliant large offre narrative et compréhension fine de nos goûts, envies (à la demande !). Les stories Instagram et leurs micro-récits font mouche : 75% des consommateurs engagent une action après avoir vu une story Instagram. Savoir se raconter, proposer le scénario capable de refléter son identité, c'est la possibilité de tisser un lien de confiance et de séduction avec son audience.
Qui me parle ? ou le voice commerce
Google Home, Alexa, les assistants personnels ou enceintes vocales sont annoncés comme les cadeaux stars de Noël 2018. Leurs terrains de jeux de prédilection ? Musique, domotique et... questions de culture générale ! Quelles que soient les tâches qu'on leur confie, ces nouveaux doudous domestiques sont une émergence de l'arrivée en force du son dans nos vies, et donc dans la communication. Exemple avec les podcasts de la marque de mode masculine Bonne Gueule, qui choisit par ailleurs le positionnement décalé du "Conseil en style" pour définir son identité.
En conclusion
Innovation, utilisation de la data, créativité et sincérité sont les ingrédients d'une communication enrichie des pouvoirs du digital, et qui touche son public.
Se demander comment être intéressant, utile, essayer de surprendre, ces éléments doivent guider toute action de communication. Encore plus vrai quand les marques produisent des contenus dont le sens va au-delà des produits.
Construire un sillon, en affichant identité et valeurs, et le faire vivre dans la durée, en produisant des messages qui l'incarnent : la communication s'inscrit dans le long terme, et raconte une histoire au long cours
Pour aller plus loin
Quelques conseils de lecture :
Des pistes pour apprendre :
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